Les Versets Mutachabihat (ambigus) et leur interprétation

Coran mosquee

Les Versets Mutachabihat (ambigus) et leur interprétation

Les Versets Mutachabihat (ambigus) et leur interprétation

Ce texte est extrait du livre Kubra al-Yaqiniyyat al-Kawniyya du docteur Mohamed Sa’îd Ramadan El-Bouti (édition « Dar el-Fikr » Damas Syrie 1990, page 136)

Après que le Cheikh Mohamed Sa’îd Ramadan El-Bouti ait traité des attributs d’Allah, il parle de ce qui en résulte comme vérités en Âqida.

1-Tanzih Allah (rejeter au sujet d’Allah) tout attribut qui serait en opposition avec les attributs assignés à Allah , ainsi que le rejet de tout défaut.
2-Nier la raison cachée dans les actes d’Allah .
3-Allah n’est redevable de rien du tout envers Ses serviteurs, ni envers quoi que ce soit de Sa création.
4-La finalité de la volonté de l’homme devant la volonté d’Allah .
5-El-Qada’a wa el-Qadar, le destin et la destinée, leurs sens et l’obligation d’y croire.

Pour revenir au premier, le « Tanzih », l’explication de ceci est tout simplement, que puisqu’Allah possède comme attribut par exemple la « Puissance absolue », on ne peut lui attribuer son contraire, c’est-à-dire « L’incapacité »

Donc on nie les contraires de tous les attributs d’Allah établis de façon sûre (par les preuves des textes et de la raison) par les savants.

Allah, par conséquent de ces attributs (l’unicité, la non-ressemblance, la science, la volonté etc), ne peut avoir d’associé, ne peut être situé ni dans le lieu ni dans le temps, n’est pas un corps et on ne peut donc pas faire signe qu’Il se trouve dans telle direction, on ne peut Lui attribuer la mobilité et le déplacement d’un lieu à un autre… tout comme Il ne peut être défini par un attribut qui implique l’ignorance, le mensonge, le sommeil, l’oubli ou la contrainte, etc.

 

 

Les versets équivoques et la position des Salafs (les anciens) et des Khalafs (les successeurs) vis-à-vis d’eux :

Cependant, malgré ce que l’on vient de dire, il se trouve qu’il existe des versets et des hadiths qui dans leur sens apparent laissent entendre la présence de certains attributs qu’on vient de nier à Allah par le « Tanzih », tels que la direction, le corps, la localisation dans le lieu et la mobilité.
En voici quelques exemples :

« et que ton Seigneur viendra ainsi que les Anges, rang par rang,» sourate El-Fajr. v.22

«… la main d’Allah est au-dessus de leurs mains. » sourate El Fath, v.10

«… Ses deux mains sont largement ouvertes : Il distribue Ses dons comme Il veut…. » Sourate El-Ma’eda. V 64

« Le Tout Miséricordieux S’est établi (Istawa) sur le Trône. » sourate Taha. V5

Ou la parole du messager –sur lui la grâce et la paix- : « Les cœurs des hommes sont entre deux doigts des doigts du Miséricordieux »

Ou sa parole : « Certes Allah à crée Adam à son image ».

Alors comment harmoniser ce qu’on vient d’affirmer par des preuves irréfutables avec le sens apparent de ces textes ?

La réponse est que ces textes sont du genre « équivoque » (moutachabihat) dont Allah nous a parlé dans le Coran.

On entend par équivoque tout texte dont le sens prête à plusieurs possibilités d’interprétation.

Par ailleurs, nous avons également des textes qui traitent des attributs d’Allah et dont le sens est clair et ne prête à aucune interprétation. On appelle cela des versets « Mohkamates« , comme Sa parole -exalté soit-Il :

« Il n’y a rien qui Lui ressemble » sourate El-Chourra. V11

Et Sa parole :

« Dis : Il est Allah, Unique. / Allah, Le Seul à être imploré pour ce que nous désirons. / Il n’a jamais engendré, n’a pas été engendré non plus. / Et nul n’est tel que Lui». Sourate El-Ikhlass.

Allah nous a clairement enjoint dans le Coran de suivre les versets clairs (mohkamates) dans leurs sens évident et de baser notre Âqida dessus, et de placer les textes équivoques (moutachabih) en second lieu, après les textes clairs, et de les comprendre à travers les textes clairs et sans équivoques.

Allah a d’ailleurs mis en garde ceux qui délaissent les textes clairs pour les textes équivoques afin de les interpréter à leur guise, à ce sujet Il dit :
« C’est Lui qui a fait descendre sur toi le Livre : il s’y trouve des versets sans équivoque (mouhkamat), qui sont la base du Livre, et d’autres versets qui peuvent prêter à d’interprétations diverses (moutachabihat). Les gens, donc, qui ont au cœur une inclinaison vers l’égarement, mettent l’accent sur les versets à équivoque, cherchant la dissension en essayant de leur trouver une interprétation, alors que nul n’en connaît l’interprétation, à part Allah. Mais ceux qui sont bien enracinés dans la science disent : « Nous y croyons : tout est de la part de notre Seigneur ! » Mais, seuls les doués d’intelligence s’en rappellent. » Sourate Al-Imrane. V7

A partir de là, les Musulmans se sont mis d’accord sur le fait de rejeter le sens apparent de ces textes qui peuvent nuire aux attributs d’Allah.
Après qu’ils se soient mis d’accord là-dessus (et c’est ce à quoi il suffit au musulman de croire), ils ont divergé quant à l’attitude qu’il faut avoir vis-à-vis des textes équivoques.

 

L’attitude des Salafs (les premiers musulmans) :

-Ne pas se plonger dans des explications détaillées de ces textes.

-Se contenter d’affirmer ce que Allah s’est attribué Lui-même.

-Rejeter tout élément d’infériorité ou d’imperfection ainsi que tout ce qui peut impliquer une ressemblance avec les créatures.

Le moyen utiliser par les Salafs pour arriver à cela est l’interprétation globale (el-Ta’awil el-Ijmali) tout en confiant le sens réel de ces textes à la science d’Allah.

Il faut préciser que le Ta’awil el-Ijmali veut dire rejeter le sens qui peut prêter à confusion et laisser croire à une quelconque ressemblance entre Allah et Ses créatures.

Mais il n’a jamais été question de laisser ces textes équivoques sans aucune interprétation (ta’awil), ni globale ni détaillée, ceci n’a été fait ni par les Salafs ni par les Khalafs (les successeurs), car il n’est pas permis de le faire (s’abstenir de toute interprétation).

En effet, laisser ces texte tels quels créerait des contradictions dans le Coran, alors que celui-ci est innocent de telles contradictions.

Si tu te lances à interpréter Sa parole –exalté soit-il : « Le Tout Miséricordieux S’est établi (Istawa) sur le Trône. » sourate Taha. V5

Et sa parole : «… et Nous sommes plus près de lui que sa veine jugulaire » sourate Qaf. V16

Si tu interprètes ces deux versets selon leurs sens apparent sans Ta’awil global, tu imposeras alors au livre d’Allah une contradiction dont il est innocent. Car comment Allah peut-Il être sur Son trône (sans ta’awil) et être en même temps plus proche de moi que ma veine jugulaire (sans ta’awil) ?!

Mais si tu fais le « Tanzih » d’Allah de la ressemblance avec ces créatures, puis que tu confirmes à Son sujet ce qu’il a confirmé pour lui-même, d’une manière qui sied à Sa perfection et Sa magnificence, et ce en confiant le sens voulu de ces textes à Allah , tu seras à l’abri alors de la contradiction dans la compréhension et tu éviteras au saint Coran un semblant de contradiction.

Et ceci est la méthodologie des Salafs – qu’Allah les agrée.

Ne vois-tu pas qu’ils disaient à propos de ces textes : « amirouha bila kayf = faites passer ces textes sans comment » (L’Imam Malik disait cela, ainsi que Soufiane Ibn Uyayna et Abdullah Ibn El Moubarak. Voir aussi les sounans de Thirmidi 3/24 et le livre de la foi d’Al Bayhaqi 43).

S’ils n’avaient pas fait d’interprétation globale selon le sens qu’on a démontré, ils n’auraient pas dit cela ! Et comment pouvaient-ils laisser passer ces textes équivoques sans interprétation, alors que les sens apparents de la langue Arabe sont clairs et indiquent une sorte d’anthropomorphisme vis-à-vis d’Allah -exalté soit-Il.

Or, ils avaient acquis la certitude que l’affaire n’est pas comme les apparences semblent l’indiquer, et ce à cause des textes clairs (mohkamates, qui ne laissent aucune part au doute).

Par contre, les Salafs n’ont pas jugé nécessaire d’expliquer ces textes par d’autres moyens. Et c’est ce qu’on appelle ne pas faire de ta’awil tafssili (l’interprétation détaillée).

L’attitude des Khalafs (les sucesseurs) :

L’attitude des Khalafs, qui sont venu après, a consisté à interpréter ces textes équivoques de sorte qu’ils soient en harmonie et sur la même ligne que les textes clairs (Mohkamates) qui stipulent clairement le Tanzih Allah de la direction, du lieu et des membres.

Donc ils ont interprété : « Le Tout Miséricordieux S’est établi (Istawa) sur le Trône. » sourate Taha. V5 par: l’établissement de la force et du pouvoir.

Et c’est un sens connu et supporté par la langue Arabe.

Et ils ont interprété la main dans l’autre verset par la force et la générosité.

L’œil par la protection et le soin.

Ils ont interprété les doigts dans le hadith par la volonté et la puissance.

Et ils ont dit sur le hadith qu’Allah a créé Adam à son image, que l’article revient à Adam et non à Allah , ce qui veut dire qu’Allah a créé Adam dès le début selon sa forme actuelle sans qu’il soit passé par des étapes d’évolution pour arriver à l’image qu’il a aujourd’hui.

Ou même si l’article revient à Allah , cela veut dire qu’Il l’a doté de certains attributs divins, tels que la science, etc.

 

Conclusion
Saches que la méthode des Salafs à leur époque était la meilleure et la plus saine, et la plus compatible avec la foi innée enracinée dans le cœur et la raison.


Et que la méthode des Khalafs à leur époque est devenu la finalité à laquelle on n’a pas d’alternative, à cause des nouveaux courants de pensées qui sont apparus, et à cause des règles de la langue Arabe et ses styles d’éloquence qui ont évolué.

L’essentiel est que tu comprennes que les deux méthodologies avaient le même objectif, celui de proclamer qu’Allah ne ressemble à rien de Sa création, et qu’Il est exempt de tous les attributs d’imperfection. La différence n’est finalement qu’une différence de langue et de forme.

Source : Razes Aslama.

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